Audrey Aumegeas ; Marine Coullard ; Charlotte Delval ; Vincent Girard ; Loïc Leclercq

WEIRDO RAINBOW 2

Project Info

  • 💙 Cité internationale des Arts Paris - Slovénie Studio
  • 💚 Audrey Aumegeas ; Marine Coullard ; Charlotte Delval ; Vincent Girard ; Loïc Leclercq
  • 🖤 Audrey Aumegeas ; Marine Coullard ; Charlotte Delval ; Vincent Girard ; Loïc Leclercq
  • 💜 Loïc Leclercq
  • 💛 Loïc Leclercq

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Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
Group show
Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
Marine Coullard, all dogs go to heaven, 2023
Marine Coullard, all dogs go to heaven, 2023
Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
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Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
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Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
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Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
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Vincent Girard, Sphynx, 2023 ; Velours, 2022
Vincent Girard, Sphynx, 2023 ; Velours, 2022
Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
Loïc Leclercq, Exhale, 2024
Loïc Leclercq, Exhale, 2024
Charlotte Delval, Enseigne, 2022
Charlotte Delval, Enseigne, 2022
Audrey Aumegeas, Sans titre, 2022
Audrey Aumegeas, Sans titre, 2022
Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
Weirdo Rainbow 2, Cité internationale des Arts, Slovénie Studio, Paris, Exhibition view
C’est l’heure de la sieste. Il faut se laisser partir et accepter que nos pensées s’égarent et se bousculent, qu’elles se regardent et se mélangent. Le souffle profond et les yeux retournés vous êtes bien installé·e. Ça ne durera pas longtemps, vous avez mis un minuteur sur votre téléphone, vingts minutes à peine, juste ce qu’il faut avant de retourner travailler. Une “power nap” comme vous l’a conseillé un·e ami·e. Vos paupières sont lourdes, très lourdes. Vous pensez à un couloir immensément long, dans une sorte d’hôtel des années 60. Vous le trouvez plutôt lugubre, le sol brille d’un vert sombre, les murs sont mouchetés, les sources lumineuses fades, vous le trouvez à votre goût. Il y a des dizaines de portes mais vous avancez sans en emprunter aucune. Le sol verdâtre couine sous vos pas jusqu’à presque arriver au bout du couloir, une porte sur votre droite attire votre attention. Il y a un cartel en plein milieu et on peut y lire “SLOVENIE”. Ce n’est en revanche pas pour cette raison que cette porte vous intrigue, parce que la Slovénie ne vous évoque rien/C’est absolument pour cette raison que cette porte vous intrigue, vous adorez ce pays et sa culture. Toujours est-il qu’une poignée étonnamment longue sort de la porte, il semble que cinq accroche-portes y soient suspendus, les uns à côté des autres. Ça vous fait rire/Ça vous ennuie. Vous tirez la bobinette, la porte s’ouvre, vous entrez. La salle est remplie d’une foule hétéroclite et malgré tout ce monde et cette agitation le silence est absolu. Bien qu’une fois revenu·e à vous vous avouerez ne pas connaître ces noms, pour l’heure vous semblez être familiers avec tout le gratin ici présent. Vous croisez Audrey Aumegeas que vous saluez. Sa robe aux influences art nouveau vous évoque une fleur. Lorsqu’elle vous parle vous voyez du velours grimper sur les murs et du formica envelopper les portes, des roses apparaissent en ouvrant leurs yeux grands comme des diamants. Elle hoquette, tout disparaît sans laisser de traces, sauf le formica. Elle s’excuse et reprend : des motifs se bousculent, les lignes droites insultent/complimentent les lignes courbes, tout ça fuse dans tous les sens mais tout le monde ni par gagner sa place, chacun dans sa case et ils ont ère allure ; il faut dire que tout est parfaitement équilibré. Elle hoquette encore, cette fois-ci rien ne se passeet ça semble la surprendre. Vous échangez encore quelques minutes quand vous êtes interrompu·e par un étrange personnage, une cravate en satin, peut-être son amant·e, qui l’invite à danser. Iels tournoient dans la pièce comme dans un cartoon, saupoudrant leur décor d’une nuée de graphite mat, puis iels concluent en renversé arrière : un vrai final de film en noir et blanc.Vous auriez bien discuté davantage mais le spectacle en valait le coût. En vous retournant pour continuer votre tour vous manquez d’écraser quelque chose. Vous riez en vous apercevant que ce quelque chose c’est Loïc Leclercq que vous n’aviez pas de suite reconnu. Il faut dire qu’il a un visage assez commun, mais c’est dans ses détails et son attitude qu’on le remet bien. Vous le complimentez sur sa chemise à carreaux, elle est en papier Olin légèrement crème, les coutures sont tantôt faites à l’agrafe tantôt scotchée. Il a l’air plutôt er des taches d’usure sur son vêtement, tout comme des légers reflets colorés que la doublure du col projette sur une partie de l’épaule. Il ne dit rien mais bombe légèrement le torse, vous remarquez que les boutons ne sont pas tous les mêmes, vous aimez bien le carré, parce que les autres sont ronds bien évidemment, mais aussi parce que le l avec lequel il a été cousu est vert anis et non blanc comme pour le reste. Le moment passe : il vous est agréable/ses mots qui traînent vous agacent. Il a l’air niais qu’ont les amoureux et les poètes. Ses cheveux sont tout ébouriffés, il aurait pu se coiffer, “on dirait un nid”. Vous lui dites et ça semble le combler de joie, il va se lover contre un oreiller calcaire, observant les autres, sourire en coin. Une postière d’un drôle de genre s’approche de lui. Elle est toute petite, quelque chose comme 22 cm de haut par 16 cm de large. Elle se penche et dépose une lettre devant lui. Vous ne savez pas par quel moyen mais sa tenue, bien qu’enfilée, semble encore parfaitement pliée et prête à être déposée dans une commode ou une armoire.Son pantalon et sa veste ont la couleur d’une crème glacée à la vanille et lorsqu’elle se tourne pour se diriger dans votre direction, s’animent sur ses manches de subtils reflets : vous y voyez un cœur en barbelé/vous y voyez un lévrier qui accoure. Elle est accompagnée de tout un tas de silhouettes monochromes qui flottent comme des bulles de lampe à lave autour d’elle. Ces silhouettes vous semblent familières, mais vous ne vous souvenez plus exactement où vous les auriez croisées. La regarder vous rend curieux·se/la regarder vous rend perplexe. Elle s’arrête à un petit mètre de vous, relève la tête, c’est Marine Coullard. C’est votre tour, elle vous tend une enveloppe couleur bleuet et vous remercie de l’accepter puis s’en va en distribuer aux autres. Vous auriez bien aimé faire plus amplement sa connaissance, dommage. Vous décollez soigneusement la patte de l’enveloppe/vous la déchirez avec vos gros doigts. Dans tous les cas vous vous coupez avec le papier et les quelques gouttes de sang s’envolent comme des pétales de cerisier. C’est un message codé. Non, c’est une lettre, une déclaration sous la forme d’un fragment. C’est une lettre d’amour, ici adressée à une chanson qu’elle adore. Une lettre d’amour sous la forme d’une silhouette. Cette dernière se détache du papier comme une méduse a n de rejoindre les autres déclarations qui suivent la postière. Dans un coin de la pièce vous voyez Charlotte Delval, adossée au mur, une jambe repliée. Vous sentiez son regard depuis un petit moment déjà mais sans que ça vous préoccupe. D’un signe de tête elle vous salue. Hésitant un instant vous décidez d’aller la voir. Elle manque de vous broyer la main en vous la serrant mais son sourire franc vous fait dire qu’il n’y a aucune malice derrière, elle n’a sans doute pas conscience de sa propre force. En papotant quelques mondanités vous notez plusieurs choses : phrasé de détective véreux, haleine de café, odeur de savon. Ça faisait longtemps que vous ne l’aviez pas vue, pourtant son allure poulpesque et les bijoux en toc dont elle se pare ne passent pas inaperçus. Sa peau violette, molle, presque translucide par endroits semble à la fois dure comme un cuir tanné et friable comme du sable mouillé. À son coude, ses oreilles et ses genoux quelques bouts sont manquants, d’ailleurs un morceau vient de tomber lorsqu’elle s’est frottée le nez. Ça ne l’inquiète pas. Son bras gauche a des courbes douces comme un galet longtemps roulé par le ressac de la mer, son bras droit est comme une pierre qui vient d’éclater, ciselé, une rangée de poignards. Elle vous parle de sa grand-mère, de ses lectures et ne manque pas de prendre des nouvelles de vous et de votre famille. Elle a un rire railleur et n’hésite pas à vous rentrer dedans, vous ne vous démontez pas et lui rendez la pareille/vous prenez la mouche et vous renfermez sur vous même. Imperturbable elle vous tape dans le dos et prend congé, elle a reconnu quelqu’un·e de chèr·e à ses yeux et va la·le rejoindre. Elle roule des mécaniques, traînant ses tentacules sur le sol froid de la salle en chantonnant Sweetest Perfection de Depeche Mode. Vous sentez une étrange présence derrière vous, une vague de froid parcoure votre dos, vous n’osez pas dans un premier temps puis prenant votre courage à deux mains vous vous retournez subitement. Une créature filiforme vous regarde de ses grands yeux ronds, vous êtes obligé·e de vous tordre le cou tellement elle est immense. Son corps est vaporeux et vous en percevez difficilement les contours, vous ne dites pas un mot. Le nuage se dissipe alors que la créature souffle dans un cotillon. La langue de papier s’étend de tout son long jusqu’à lécher le bout de votre nez, vous louchez. Vous voyez plus clair, la créature est en fait Vincent Girard. Derrière ce voile inquiétant vous découvrez un personnage moqueur qui vous est fort sympathique. Après s’être excusé de vous avoir fait peur il décide de se rattraper en vous contant une de ses histoires favorites : la chasse à la galipote dans le marais poitevin. Il gesticule dans tous les sens, habité par les personnages de son aventure et vous ne quittez pas sa tête de poisson des yeux. Sa peau est comme faite d’une superposition de fines couches colorées, vous êtes sûr·e de pouvoir toutes les compter si vous vous concentrez bien, mais il bouge trop. Lorsqu’il marche, sortent de sous ses pattes des touffes de Laitues Scarioles et de Pissenlit, des Coquelicots et des Scolyme d’Espagne. Il est si grand qu’il est obligé de se courber comme un cintre, en deux, trois, quatre, prenant appuis sur les murs pour se déplacer sans tomber. Ses mains laissent une substance éthérée et gluante sur les parois, la sève étincelante coule jusqu’au sol puis s’évapore, ça le fait rire. Finalement vous aviez tord de vous en méfier.Vous observez l’entièreté de la salle, ses gens. Le silence toujours présent est brisé par le hoquetement d’Audrey, une alarme incendie se déclenche, la pièce éclate comme une bulle de savon. C’est en fait votre sonnerie de téléphone. Vous ouvrez et refermez les yeux l’un après l’autre et ainsi de suite, trois fois durant, comme pour réactiver votre vue. Vous croisez votre regard dans le reflet d’une vitre, hagard, d’un mouvement pâteux vous ré humidifiez votre bouche sèche, mais sèche ! vous avez encore dormi la bouche ouverte. Une tâche sur votre col vous fait comprendre que vous avez dû baver cette fois-ci. Ça vous remémore les sécrétions vaporeuses d’un homme poisson qui était dans votre rêve, intrigué vous essayez de vous souvenir davantage mais rien ne fait sens, tout semble dans le désordre. Dommage, ça vous arrive si peu souvent de rêver. Cette sieste, bien que courte, vous a fait du bien.
Loïc Leclercq

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